Nos chevaux

Dix ans au manège

Cinquième partie

Abel

Abel sautait merveilleusement...

Dans cette série « 10 ans au manège » , on écrit encore sur un poney ! Décidément, pour travailler longtemps, il vaut mieux être petit cheval.

Avant juin 1996, Abel (19 ans, cette année) vivait avec Juju chez Mr Vanderheyden à Henri-Chapelle.

Au début, c'était un cheval plein de sang, trop chaud même pour être un bon poney d'école, mais il sautait merveilleusement bien : du style, de l'allant et beaucoup de respect. Il fut le premier « cheval de sport » de Marie Lequarré qui a réussi avec lui plusieurs prestations appréciables, en complet et en jumping. Pendant un temps ceux qui le montaient à l'obstacle se sont régalés.
Cependant, en quelques séances, ces bonnes dispositions se sont évanouies… pour ne plus jamais revenir !
Nous l'avions confié à un garçon d'une douzaine d'années pour un cycle d'obstacles. Il est juste de dire que ce cavalier était faible. Maladroit, à contre temps, il avait une main épouvantable qui s'agrippait à la bonne bouche d'Abel dés qu'il subissait des difficultés. Ces « difficultés » survenaient plusieurs fois par leçon, particulièrement sur les oxers, même ceux de 60 cm . Toutes les montures étaient attribuées, et pour une question de taille, il n'y avait pas moyen de changer les affectations. Il aurait fallu arrêter le carnage, mais les parents du gamin étaient des gens charmants et je n'eus pas le cœur de leur dire : «postposons le cycle, votre fils fera de l'obstacle dans un an ou deux » Grave erreur !
Peu à peu Abel perdit confiance, ses refus sur les oxers devinrent systématiques et il fut impossible de le rattraper, même avec un travail de longue haleine à l'aide des meilleurs. Voilà comment on peut gâcher un excellent cheval ! Sur ce coup là, 8 ans après, je m'en veux encore de ne pas avoir été plus ferme, mais on m'a tant reproché de l'être trop ! Pourtant que de bêtise évitée grâce à cette rigueur !


A Abel, peuvent convenir beaucoup de surnoms.

L'on pourrait penser à « Abel le Magnifique » : avec son profil concave, son nez tout blanc, ses balzanes et sa robe atypique (pie-rouan), il est le favori parmi l'écurie des poneys. Son œil doux attire la caresse et son poil brillant la brosse à lustrer.

« Abel la Coqueluche  » peut également être adéquat. En effet, il a tout pour plaire. Au box, c'est un véritable charme, il n'a jamais un geste agressif ou agacé envers les enfants. En témoignent ses crins toujours parfaitement démêlés par des dizaines des cavaliers qui passent leur temps dans sa stalle à le panser et le cajoler. Il attend patiemment que les mains inexpérimentées et malhabiles des petits déposent la selle sur son dos et glissent le mors entre ses dents qu'il ne rechigne jamais à ouvrir. Il ne cherche pas à les impressionner, il est attentif à ne pas poser ses pieds sur leurs bottes et à ne pas les effrayer par des gestes brusques.

En piste, Abel est un vrai bolide. Bien que de nombreuses heures de leçons aient quelque peu entamé son ardeur, il a procuré des sensations fortes à beaucoup de cavaliers. Il est capable de démarrages intempestifs difficilement contrôlables (car Abel n'a plus ce qu'on pourrait appeler une « bouche en or », bien au contraire) Certains se souviennent d'avoir allègrement sauté la séparation pour se retrouver au beau milieu du cours des shetlands. Dans les jeux, Abel évite les autres chevaux avec souplesse et allonge volontiers sa foulée de galop pour atteindre le premier la ligne d'arrivée.

Même s'il est susceptible de se déchaîner, rares sont ceux qui en tombent. C'est un poney plein d'énergie, mais qui ne chercher jamais à « vider sa selle ». La plupart du temps, il effectue consciencieusement les exercices qu'on exige de lui, avec cette démarche caractéristique qu'on lui connaît : tête basse, nez vers le sol, appuyé sur son mors, il se tire plus qu'il ne se propulse. Il a adopté cette technique de déplacement qui lui permet de supporter son lot de séances hebdomadaires et les nombreuses –mais légitimes- gaucheries des cavaliers sans trop se fatiguer. Les enfants qui passent des shetlands aux poneys sont rassurés par sa gentillesse et sa bonne volonté évidente. Ils prennent confiance en eux, oubliant le stress que procure le fait de monter « un grand poney ».

On pourrait aussi l'affubler du surnom de "Roi de l'évasion ". Il n'est pas rare en effet que l'on retrouve Abel dans un box provisoirement déserté par son occupant légitime, le nez dans la mangeoire, ou effectuant sa petite promenade de santé sur le parking et s'arrêtant pour brouter quelques brins d'herbe. On aura beau ajuster son licol au plus serré, il trouvera toujours le moyen de s'en défaire.

Enfin, Abel est le poney dont on se souviendra comme un amoureux fidèle et inconsolable depuis qu'il est séparé de sa Gribouille, récemment achetée et emmenée par sa propriétaire.

Michel Lequarré (avec Charlotte Lousberg )

Abel en 2002 avec Marie Lequarré et en 1997 avec Phong Hoang.

En 2007 et au cross en 1998

 

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Mise à jour : 2-fév-08 ]